Saint-Pons-de-Thomières et le Pays Saint-Ponais
Histoire et patrimoine de l'ouest du département de l'Hérault

Le château de Beaufort (Hérault)

Le château de Beaufort, dans le Minervois, occupe le sommet d'une étroite colline dominant la plaine d'Olonzac et la route de Narbonne à Minerve. Le village s'est développé entre le château et de l'église romane Saint-Martin (en grande partie reconstruite au 19e siècle). Certains élements de la muraille au nord de la forteresse pourraient remonter au 11ème et 12ème siècle.

château de Beaufort
Beaufort et son château sur la carte de Cassini (18ème siècle)

Le premier possesseur connu du château est Oton de Beaufort, cité dans un texte de 1095. En 1145, Guillaume de Beaufort apparaît comme témoin dans un acte de donation de Guillaume de Minerve. En 1192, Etienne de Beaufort et son fils Bernard font donation à l'abbaye de Fontcaude d'un fief à Olonzac; en 1207 Raymond de Beaufort devient moine de ce monastère, à l'instar d'autres familles de la noblesse locale comme les Olonzac ou les Villespassans. Après la Croisade Albigeoise, Bernard de Beaufort, le dernier représentant connu de cette famille , est dépossédé de ces biens comme faidit (considéré comme hérétique, ou les protégeant).

château de Beaufort
Le château repose sur l'enceinte du Moyen-Age

En 1234, le sénéchal de Carcassonne assigne différentes terres du Languedoc dont celle de Beaufort à Simon et Lambert de Thurey et leur mère Béatrix, veuve d'un compagnon d'armes de Simon de Montfort. La seigneurie et le château restent entre les mains de la famille de Thurey jusqu'en leur vente en 1378 à Pierre Isarn, juge mage de la sénéchaussée de Carcassonne et anobli l'année prédédente (*). Durant trois siècles, huit générations de cette famille se succèdent comme seigneurs et châtelains de Beaufort

château de Beaufort
La tour sud-ouest du château

D'importants travaux sont réalisés vers la fin du 15ème et au début du 16ème siècle: la construction de la tour ronde au sud-ouest du château, et l'élévation du logis principal datent de cette époque. Plusieurs fenêtres à meneaux, typique de la Renaissance, en partie murées sont encore visibles sur les façades. Une partie des ces aménagements est probablement réalisée par Bernard d'Isarn, gouverneur du château de Minerve de 1495 à 1529, introduit à la Cour du roi Louis XI, où il occupe la charge de gentilhomme de la chambre du roi

Lors de guerres de religion qui ravagent le Minervois à partir de 1570, le rôle du château de Beaufort est mal connu. En septembre 1590, le lieu se soumet momentanément aux Ligueurs, comme les villages des environs, et est semble-t-il épargné lors de la bataille d'Azillanet l'année suivante. La trêve du Mas-de-Barbieu met définitivement fin aux combats dans la région en 1592.

La famille Isarn de Beaufort semble s'être converti au protestantisme dès le 16ème siècle. Au début du 17ème siècle, la seigneurie est détenu par Isaac d'Isarn, qui s'intitule baron de Beaufort, et qui pratique la relgion réformée, notamment dans son château de Jouarres, près d'Homps, où il semble résider, comme l'indique un arrêt de 1649.

château de Beaufort
La tour sud-ouest du château

Par alliance, la seigneurie et le château de Beaufort sont transmis en 1685 à la famille de Caylus. Le château est alors à l'abandon décrit, en 1718, comme une "masure en ruine". Pierre de Caylus le vend en 1724 à la famille Amieu, fraichement anoblie en 1712 par la charge de capitoul de Toulouse, et alliée à la famille d'André installée dans le village voisin d'Azillanet. C'est finalement à François d'Amieu (/1700-1782) que revient la seigneurie de Beaufort probablement à l'occasion de son mariage en 1731 avec Marie de Vitalis de Latour d'une famille de notables d'Olonzac. Il fait hommage au roi de la seigneurie de Beaufort et du fief d'Artix le 9 janvier 1734. Né roturier, et fils de marchand, François d'Amieu de Beaufort est en conflit pendant des décennies avec ses vassaux concernant les droits féodaux n'hésitant pas à utiliser les intimidations et les violences. Il réside dans son château de Beaufort et il est vraisemblablement à l'origine des rénovations du logis du château, des modifications des embrasures des fenêtres et de la porte d'entrée.

château de Beaufort
Les cuisines du château

Après son décès en 1782, son fils lui aussi prénommé François (1744-1835), ancien mouquetaire du roi, lui succède à Beaufort. Il n'émigre pas durant la Révolution, ces biens ne lui sont donc pas confisqués. Toutefois, il est emprisonné comme ci-devant noble durant la Terreur à Narbonne, et son mobilier est mis sous scellés à Beaufort; il est finalement libéré le 10 juin 1794. Dès 1795, il est en conflit avec la commune de Beaufort concernant les vaccants du domaine d'Artix. En 1808, sous l'Empire, il est nommé maire de Beaufort, poste qu'il occupe jusqu'en 1831.

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Plafonds du château datant du 19ème

C'est probablement lui qui conduit les travaux qui modernisent l'intérieur du château, avec notamment de remarquables plafonds peints datant de l'Empire ou de la Restauration, et l'élargissement du corps du logis au nord.
Sans descendance légitime, il adopte François Saint-Maurice (1795-1847), peut-être son fils naturel, qui est autorisé par ordonnance royale en 1817 à prendre le nom d'Amieu de Beaufort. Ce dernier, qui vit désormais au château de Beaufort, épouse, sans l'autorisation du père de la mariée, Marie Claire Sahuc (1796-18..). Après le décès de son père adoptif, François d'Amieu de Beaufort devient le plein propriétaire du domaine de Beaufort. A partir de 1844, il s'adonne à la spéculation sur la vente d'alcool avec la maison de commerce bordelaise Blanchy, qui va conduire lors de l'effondrement des cours, à la ruine de la famille après son décès en 1847. Ses enfants sont contraints de vendre le château et le domaine de Beaufort par jugement d'adjudication en 1849 à Joachim Blanchy. Le château est alors habité par le régisseur de Blanchy pendant une dizaine d'années.

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La cour du château de Beaufort, au début du 20ème siècle, au temps des Merle

En 1859, les frères Jean Baptiste, Victor et Etienne Urbain Merle achètent lors d'une nouvelle vente par adjudication le domaine de Beaufort. Jean Baptiste Merle (1814-1901) y réside au moins une vingtaine d'années jusque vers 1881 (d'après les recensements). Victor et Jean Baptiste Merle sont décédés célibataires et sans enfants, respectivement en 1896 et 1901, et le domaine est transmis à leurs neveux, les enfants d'Etienne Urbain Merle. Le château n'est désormais plus habité par ses propriétaires, mais par les employés de la famille Merle. Pour l'anecdote, certains membres de la famille se font appeler jusqu'au 20ème siècle Merle de Beaufort, ce qui donne lieu à ces vers satiriques : "Beaufort vieux nid d'aigles, Aujourd'hui nid de merle, O! Fortune aux pourceaux, Tu jettes donc tes perles !"

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Le chambre du baron de Beaufort - Journée du Patrimoine 2025

Le château de Beaufort est laissé à l'abandon et vandalisé dans les dernières décennies, malgré une inscription à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1984. Actuellement de nombreuses infiltrations d'eau dans la toiture ont provoqué l'effondrement de plafonds et dégradé la voute et les décors de la chapelle. Plusieurs poutres endommagées de la charpente menacent la structure de l'édifice. Le château a désormais un nouveau propriétaire décidé à entreprendre un vaste programme de restauration, avec la participation de la Fondation du Patrimoine.

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